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ORAGES
DU 6 JUILLET 2001 SUR LE NORD-EST DE LA FRANCE |
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L'anticyclone est positionné sur les Açores et la France se situe dans une zone dépressionnaire depuis 3 jours. La dépression qui était alors dans le Golfe de Gascogne a progressivement traversé le pays dans la journée du 6 en prenant la direction du nord-est. Elle a atteint en son centre autour de 998 hPa. Le front froid associé a balayé toutes les régions du Sud-Ouest au Nord-Est, avec de nombreux orages, de fortes pluies, des chutes de grêle et de violentes rafales de vent. Ce front s'est formé à la limite entre l'air très chaud qui affectait l'Est de la France et l'air frais en provenance de l'Atlantique, le contraste de température atteignant parfois jusqu'à 10°C et plus sur une distance d'une centaine de kilomètres.
Note : n'oubliez pas que pour obtenir l'heure locale, il faut rajouter 2h à l'heure TU.
Comment de tels orages ont-ils pu prendre naissance ? En fait, au départ, c'est une situation presque classique. Plusieurs éléments caractéristiques sont repérables :
Jusque là a priori, rien d'exceptionnel, ce sont tous les ingrédients nécessaires pour la formation d'orages parfois puissants sur la ligne de convergence des vents et à la limite des deux masses d'air.
A tous ces ingrédients s'en rajoutent d'autres plus difficiles à cerner :
Si vous avez réussi à suivre jusque là (ouf !) alors les choses vont commencer à s'éclaircir (ou le contraire !). Tous ces éléments en intéraction ont contribué à la formation de puissants mouvements ascendants surtout sur le quart Nord-Est du pays, débouchant sur l'amplification des cellules orageuses déjà formées d'elles-mêmes, ou leur création. De plus, lorsqu'on regarde un radiosondage ce vendredi 6 vers midi sur le Nord-Est, on constate ce qu'on appelle un cisaillement de vent, conséquence directe des éléments précités : le vent se renforce lorsque l'altitude augmente, et sa direction tourne dans le sens des aiguilles d'une montre. Plus cette rotation est marquée, de même que l'augmentation de l'intensité, plus cela sera favorable à la création de tourbillon à axe horizontal. Avec les mouvements ascendants, l'axe du tourbillon est contraint de se redresser, on obtient un tourbillon à axe vertical, véritable moteur d'une machine desctructrice, le cumulonimbus (Cb). Lorsque le tourbillon est très fort, il peut alors conduire à la formation de tornades. Une trombe a d'ailleurs été observée près de Marckolsheim (sud du Bas-Rhin) pendant l'épisode orageux.
Notez sur le radiosondage de Nancy l'intrusion d'air sec repérable à 500 hPa par l'écart entre la courbe grise (équivalente à la température du "thermomètre mouillé") et la courbe blanche (température de l'air), ainsi que le cisaillement de vent grâce à l'hodographe (somme des vecteurs vent relevés sur le radiosondage) en haut à droite. Remarquez également la forte valeur de CAPE (énergie potentielle utilisable par une particule pour s'élever dans la troposphère), qui marque un état très instable de la masse d'air. Sous le Cb, de forts courants descendants se produisent et accompagnent les précipitations, c'est le courant de densité (air froid et sec). Il se forme dans les couches moyennes (entre les surfaces 500 et 700 hPa). C'est ce courant qui, lorsqu'il s'écrase sur le sol, donne naissance aux rafales (parfois dénommées "micro-burst" ou "macro-burst"), celles-ci pouvant atteindre parfois jusqu'à 200 km/h. C'est sans aucun doute ce qui s'est passé sur le Nord-Est, et plus particulièrement dans le parc de Pourtalès à Strasbourg, et qui a engendré cette conséquence dramatique. Il est malheureusement impossible (pour l'instant) de prévoir un phénomène qui se produit à une si petite échelle. Ce qu'on peut prévoir, c'est un ordre de grandeur des rafales sous orages, en prenant la vitesse du vent maximal estimé par les différents modèles entre les surfaces 500 et 700 hPa. Pour cet épisode orageux en l'occurrence, elles allaient jusqu'à 100 à 120 km/h, c'est ce qui s'est réellement passé en règle générale. Pour couronner le tout, le vent très sec (sirocco) qui soufflait à l'avant du système orageux ne faisait que le renforcer, du fait de l'évaporation, et donc du refroidissement qu'il provoquait (contribution au mouvement vertical et au courant de densité).
Voilà maintenant mon témoignage de ce qui s'est passé en Alsace, et plus particulièrement à Illkirch (banlieue sud de Strasbourg). Dans la journée, il faisait très chaud et très sec avec une température maximale de 31/32°C et une humidité relative descendant jusqu'à 30%. Des Altocumulus castellanus (nuages typiquement pré-orageux) s'étaient formés dans l'après-midi, couvrant partiellement le ciel, puis soudainement plus rien. Un ciel devenu complètement dégagé vers 17h, toujours chaud et sec, avec un faible vent de nord-est. L'atmosphère, comme je le disais plus haut, paraissait trouble et blanchâtre, ou jaunâtre, sans doute du fait de la présence de poussières sablonneuses. C'était bizarre, une chaleur toujours étouffante vers 21h avec encore autour de 30°C ! et une pression en baisse continue. Puis entre 21h et 21h30, je commence à voir un voile nuageux arriver, de plus en plus sombre, noir et opaque. Puis vers 21h45, le vent tourne brutalement au sud-ouest puis au nord-ouest et commence à se renforcer, et des nuages bas type stratocumulus ou cumulus fractus commencent à défiler à toute allure dans le ciel. Les premières gouttes commencent à tomber, puis de nombreux éclairs commençaient à apparaître dans le mur noir qui se dirigeait droit devant (sans doute l'arcus, mais j'avais du mal à le distinguer, j'avais une mauvaise vue de chez moi), avec de lointains roulements... Soudain, c'est la tempête, le vent souffle à une vitesse incroyable (que j'ai estimé à 100/110 km/h en rafales), et je vois passer devant ma fenêtre d'innombrables brindilles, feuilles et petites branches cassées. Un arbre (avec un tronc assez souple je dois dire !) était quasiment plié en deux. Puis soudain, un énorme craquement, c'était une grosse branche d'arbre qui venait de casser et de tomber entre 2 voitures ! C'était ahurissant, pendant 10 minutes, le vent semblait se renforcer sans cesse, tandis que le tonnerre et les éclairs se rapprochaient de plus en plus. Entre 22h et 22h15, c'est la totale, la pluie qui battait avec un vent tourbillonnant, une chute de température de presque 10°C, des éclairs se déclenchaient toutes les 2 à 3 secondes, et les coups de tonnerre faisaient de plus en plus de fracas, et une pression remontant soudainement de 9 hPa. Les premières sirènes de pompier se mettent alors à retentir. Le vent se calme un peu, mais la pluie, le tonnerre et les éclairs sont toujours aussi forts jusque vers 22h30 puis perdent progressivement leur intensité tandis que l'énorme masse sombre et compacte s'éloigne vers le nord-est. C'est alors la grande sirène d'alarme qui retentit, annonçant le plan rouge, sans doute suite aux dégâts de Pourtalès. Entre 23h et 23h30, la pluie cesse, les éclairs s'éloignent, c'était un véritable chaos. Plein de branches d'arbres, petites ou grosses, arrachées partout, des arbres déracinés par endroits, et ces sirènes qu'on entendait sans arrêt... Le ciel était redevenu plus ou moins nuageux, avec plus un seul souffle d'air.
Graphiques élaborés grâce aux
données de Météo-France.
Situation orageuse sur la France du 4 au 7 juillet Toulouse le 7 juillet à 12h50 Une situation orageuse de grande ampleur sur la France
était prévue depuis plusieurs jours. Dans les grandes
lignes, elle s'est produite comme prévu. Communiqués météorologiques de presse nationaux - le 3/7 à 12 h 42 (validité 26 heures)
: annonce du début de la période d'intempéries, Le vent à Strasbourg Contrairement à ce qui a été
entendu dans certains médias, il ne s'agit pas d'une "mini-tornade"
dont les dimensions n'auraient pas permis l'observation par le réseau
de Météo-France et encore moins la prévision
quelques heures à l'avance. Il s'agit d'une "ligne de
grains" organisée, de taille caractéristique de
300 km environ. Des rafales de vent supérieures à 100
km/h ont été observées dans de nombreuses stations
du quart nord-est. A Strasbourg-Entzheim on a relevé 96 km/h,
ce qui est à peine moins. Le phénomène observé
à Strasbourg, comme le confirment les images radar, n'est ni
plus ni moins violent que sur les régions voisines. Cartes de vigilance La carte de vigilance est produite en mode expérimental, en attendant un démarrage opérationnel le 1er octobre comme convenu avec la DDSC. Les cartes produites jeudi après-midi, vendredi matin et vendredi après-midi colorent en orange une large moitié est de la France (à l'exception du littoral méditerranéen), puis au fil de l'évolution voient le jaune gagner par l'ouest. Il faut garder en tête que la couleur orange est à un niveau de danger météorologique supérieur à celui d'un simple BRAM. Communiqué du Centre opérationnel de gestion interministérielle des crises La direction de la Défense et de la Sécurité
civiles du ministère de lIntérieur a publié
un communiqué dès le jeudi 5 juillet au soir : |
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